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DEUXIÉME PARTIE

 

INTRODUCTION

 

Durant les derniers dix-huit mois de lutte, les mouvements révolutionnaires et antifascistes vécurent dans l’erreur. La vie économique et la lutte militaire étant contrôlées par les agents de Staline appuyés par tous les ennemis politiques de la révolution, et du fait de la connivence consciente ou inconsciente de la plupart de ceux qui se déclaraient révolutionnaires, il ne pouvait y avoir d’autre issue que la victoire de Franco ou de ses alliés. Les offensives militaires lancées par le gouvernement Negrin se terminèrent pas d’horribles défaites ou de coûteuses aventures dans lesquelles les succès militaires se transformèrent rapidement en retraites. Les considérations politiques et non pas militaires dominaient toutes ces offensives, de telle sorte que les défenseurs d’un commandement unique, d’une organisation militaire et d’une discipline de fer « semblable à celle de l’ennemi », ne pouvaient être qu’amèrement déçus par les résultats.

C’est seulement lorsque les archives de la CNT-FAI seront accessibles à l’étude qu’on pourra effectivement connaître les vrais sentiments des militants et des leaders pendant cette période, parce que leur presse remplie de slogans de victoire, de propagande militariste, de glorification de la guerre et de menaces à l’égard de ceux qui négligeraient leur «  devoir » envers la « patrie », ne représentait plus la voix de l’organisation comme un tout, mais était devenue le porte-parole du gouvernement et des chauvinistes révolutionnaires. De plus, même sans preuves, on ne peut croire que ces leaders de la CNT-FAI aient été assez nalfs pour espérer encore la défaite militaire de Franco, mais plutôt, que beaucoup d’entre eux partageaient l’idée de quelques membres du gouvernement de faire tous les efforts pour prolonger la guerre à tout prix jusqu’à l’ouverture des hostilités entre l’Allemagne et l’Angleterre, que chacun prévoyait inévitable tôt ou tard. De même que quelques-uns espéraient en la victoire qui résulterait d’un conflit international, beaucoup de révolutionnaires espagnols appuyèrent la seconde guerre mondiale parce qu’ils crurent que la victoire des « démocraties » (y compris la Russie !) aménerait automatiquement la libération de l’Espagne et de la tyrannie, Francofasciste. Dans cet espoir se trouve une curieuse combinaison d’opportunisme politique et de naïveté : si le premier est commun à toutes les organisations de masses, la combinaison des deux est une caractéristique propre aux dirigeants révolutionnaires espagnols, dont Federica Montseny se montre consciente lorsqu’elle dit « en politique nous étions absolument naïfs ». Nous avons vu comment dès les premiers jours de la lutte en Espagne, les leaders anarchistes furent dépassés en toute occasion par la fourberie et les manœuvres des politiciens. Il est également significatif que leurs contacts avec les politiciens n’eurent aucune influence idéologique sur ceux-ci, tandis que de nombreux porte-parole de la CNT se rallièrent, en fin de compte, aux principes de gouvernement et d’une autorité centralisée, non « du fait des circonstances »  mais d’une façon permanente (Prieto, Garcia Oliver, Juan Peiro, Juan Lopez, pour ne citer que quelques-uns des « destacados militantes » (militants notoires) qui me viennent a l’esprit).

Après la défaite infligée en mai 1937 à la révolution par l’autorité centrale, les leaders de la CNT-FAI ne représentèrent plus une force importante pour le gouvernement qui amplifia la militarisation des milices populaires, l’abolition des patrouilles ouvrières de 1’arrière-garde et la dissolution des Collectivités, démantelant ainsi la révolution ; on laissa aux leaders de la CNT le rôle de bourreau.

Les derniers dix-huit mois de la lutte sont caractérisés non seulement par les désastres militaires ou des dizaines de milliers de vies furent sacrifiées, mais aussi par la tentative résolue de transformer totalement la CNT de l’intérieur. C’est à notre avis, d’une grande importance pour la révolution libertaire : alors que certains militants espagnols expliquent toute mesure prise comme déterminée par les « circonstances », il nous semble, en fait, que le développement rapide d’une direction autoritaire dans la CNT, de même que l’incapacité des militants à l’empêcher découlent directement du compromis sur les principes - bases adoptés en juillet 1936.


 

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